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Société de la Voie du Milieu

Le Bouddha est une source importante de notre compréhension historique de la Voie du Milieu, qui se reflète à la fois dans l’histoire de sa vie et dans de nombreuses paraboles et enseignements qu’il est enregistré comme donnant dans le Canon Pali (les premières écritures bouddhistes). Cependant, dans la société, nous voulons souligner l’universalité de la voie du milieu, qui est accessible dans l’expérience de chacun, et que l’on retrouve donc, dans une certaine mesure, dans d’autres religions, dans les sciences, la philosophie et les arts, ainsi que dans le bouddhisme. Le Bouddha n’est en aucun cas la seule source d’information sur la voie du milieu, et notre compréhension de celle-ci ne dépend pas de la prétendue illumination du Bouddha. Le Bouddha est donc une question secondaire. Pour un compte rendu plus général de la Voie du Milieu, veuillez vous rendre sur la page Voie du Milieu.

La tradition bouddhiste reconnaît souvent en théorie l’universalité de la Voie du Milieu, mais en pratique, tout l’accent est mis sur les comptes rendus particuliers de la Voie du Milieu donnés par le Bouddha et ses disciples dans la tradition bouddhiste. Si vous commencez à parler de la voie du milieu en général, ils peuvent dire « Ah, mais c’est la voie du milieu du Bouddha ? », comme si c’était le Bouddha qui rendait la voie du milieu utile, plutôt que l’inverse.

Si vous croyez que l’illumination du Bouddha lui a donné une vision spéciale de la réalité et donc une autorité spéciale, cela produit une croyance métaphysique qui est en conflit avec la voie du milieu. En effet, les affirmations relatives à l’illumination du Bouddha sont en pratique au-delà de notre expérience, et ne nous sont accessibles qu’en théorie lointaine si nous obtenons nous-mêmes l’illumination. Un choix décisif doit être fait ici : car si vous acceptez une autorité métaphysique de ce type, l’effet est susceptible de miner constamment la pratique de la Voie du Milieu, conduisant au mieux à la confusion.

C’est pour cette raison que la Société veut rompre clairement avec toute autorité issue de la tradition bouddhiste, et donc nous ne donnons pas la première place au Bouddha dans l’introduction de la Voie du Milieu. Cette rupture avec l’autorité du Bouddha doit être suivie en justifiant la Voie du Milieu principalement en termes d’utilité pratique, et non en s’appuyant sur les écritures bouddhistes.

Néanmoins, le Bouddha doit toujours être crédité d’avoir offert la plus importante source précoce de la Voie du Milieu. Les histoires et les enseignements rapportés du Bouddha peuvent également toujours être une source d’inspiration importante (bien que tout à fait facultative) pour suivre la voie du milieu. Il existe une zone grise dans laquelle il est souvent difficile de savoir où s’arrête l’inspiration et où commence la justification, mais cela ne doit pas nous empêcher d’être inspirés par le Bouddha, comme nous pourrions aussi être inspirés par d’autres figures d’autres traditions.

Voici donc quelques éléments de la vie et des enseignements du Bouddha qui peuvent offrir beaucoup d’inspiration pour la voie du milieu. Qu’on ne se plaigne pas qu’ils soient choisis parmi les écritures et interprétés d’une manière plutôt que d’une autre, puisque c’est la Voie du Milieu qui fait que les écritures bouddhistes valent la peine d’être lues en premier lieu, afin que nous puissions y trouver quelque chose de précieux et d’utile.

Le récit de la vie du Bouddha

Le récit de la vie du Bouddha jusqu’à son illumination illustre directement la Voie du Milieu. Plus important encore, elle illustre la Voie du Milieu en tant que méthode promulguée, plutôt que (comme elle est souvent devenue dans les mains des bouddhistes ultérieurs) une autre croyance métaphysique.

Le Bouddha aurait été élevé comme un prince, vivant une vie très protégée dans un palais. Ses parents étaient censés l’avoir protégé de toute reconnaissance de la souffrance, dans une sphère de plaisir isolée. Cependant, lorsqu’il était jeune homme, il est devenu agité et a fait une promenade en char qui lui a permis d’échapper à ses gardiens. Dans le monde extérieur, il aurait vu les « quatre vues » – la vieillesse, la maladie, la mort et un mendiant religieux. Les trois premières ont renversé sa conscience refoulée de la souffrance, tandis que la quatrième lui a fait prendre conscience de la possibilité d’un autre mode de vie. Sous l’impact de cela, le Bouddha est devenu déterminé à trouver une solution à la souffrance qu’il avait vécue, et a quitté le palais pour devenir lui-même un mendiant religieux, errant dans la forêt.

Dans la forêt, le Bouddha a ensuite passé des périodes d’apprentissage auprès de deux maîtres différents, mais a finalement dépassé ce qu’aucun d’eux pouvait lui enseigner, et ne pouvait plus rester satisfait de leurs limitations. Il s’est alors rapproché de cinq ascètes, qui croyaient que la pratique d’austérités (comme le jeûne extrême ou le fait de se soumettre à des douleurs corporelles) conduirait à des récompenses dans une vie future. Après avoir excellé dans ces austérités, cependant, il aurait reconnu leurs limites, abandonné le jeûne et reconnu que pour progresser davantage, il avait besoin de la voie du milieu.

Cette version cinématographique de Petit Bouddha met en scène le récit traditionnel de cette reconnaissance.
Les éléments cruciaux de la voie du milieu sont présents dans les méthodes par lesquelles le Bouddha l’a progressivement découverte. Son contexte familial, au palais, était dominé à la fois par l’expérience du plaisir et par la croyance en des vues conventionnelles qui évitaient toute voie vers une moralité plus objective. En quittant ce contexte, cependant, il a cherché des alternatives absolues dans les croyances métaphysiques de ses maîtres et des cinq ascètes. Dans chaque cas, c’est la croyance qu’un type particulier de point de vue était absolu qui a restreint la pratique des gens autour du Bouddha. Pour trouver la voie du milieu, il devait dépasser la loyauté envers l’un ou l’autre groupe et être prêt à utiliser sa propre expérience pour trouver une perspective équilibrée qui répondait mieux aux conditions.

Le « silence » du Bouddha

Le silence du Bouddha, ou avyakrta, était sa réponse lorsque des disciples lui posaient des questions métaphysiques, une histoire qui apparaît plusieurs fois dans le Canon pali (par exemple, Majjhima Nikaya 63). Comme c’était sa coutume, le Bouddha restait silencieux lorsqu’il pensait qu’il ne serait pas utile de répondre à une question, mais lorsqu’il était pressé, il y répondait la troisième fois, et expliquait dans ce cas que les vues métaphysiques étaient « non bénéfiques, cela n’appartient pas aux fondamentaux de la vie sainte ».

Les vues métaphysiques spécifiques sur lesquelles le Bouddha était interrogé étaient de savoir si le monde est éternel ou non, si le monde est infini ou non, si l’âme est la même que le corps et si une personne éclairée continue d’exister après la mort. L’interprétation restrictive que la tradition bouddhiste donne souvent à cet épisode est de le considérer comme ne concernant que ces vues métaphysiques spécifiques (qui se trouvaient être particulièrement préoccupantes dans le contexte du Bouddha) plutôt que comme des exemples de la meilleure réponse à toutes les vues métaphysiques. Mais l’applicabilité universelle de cette histoire ne découlera que de cette dernière interprétation.

Le Kalama Sutta

Dans ce célèbre épisode (Anguttara Nikaya 65), le Bouddha se voit demander conseil par un groupe de villageois qui sont confus par tous les différents enseignants religieux contradictoires qu’ils ont entendus. Ils ne savent pas qui croire, ni comment les départager. Le conseil du Bouddha est le suivant : « Lorsque vous savez vous-mêmes » qu’une opinion particulière est celle d’une personne sage, ils doivent l’accepter. En d’autres termes, il semble que nous devrions consulter notre propre expérience plutôt que de nous fier à l’autorité religieuse. La tradition bouddhiste a, bien sûr, fait de son mieux pour neutraliser la menace pour la métaphysique bouddhiste qui découlerait du fait de prendre cela au sérieux, en faisant valoir, par exemple, que ce conseil ne s’applique qu’aux enquêteurs et non aux bouddhistes engagés.

La parabole du radeau

La parabole du radeau (dans Majjhima Nikaya 22) compare les enseignements à un radeau utilisé pour traverser le Gange. De même qu’en débarquant sur l’autre rive du fleuve, on laisse le radeau derrière soi plutôt que de le transporter à travers la terre, de même on devrait laisser derrière soi les enseignements qui ne sont plus pertinents ou utiles. Cette contingence des enseignements est incompatible avec l’autorité métaphysique – car si un enseignement métaphysique pouvait être abandonné à tout moment, il ne serait plus « vrai ».

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Ce n’est qu’une sélection de quelques-unes des plus importantes références à la Voie du Milieu dans la vie et les enseignements du Bouddha. Il en existe beaucoup d’autres moins évidentes. Pour une discussion plus approfondie de ce sujet et de bien d’autres, veuillez consulter le livre de Robert M Ellis, The Buddha’s Middle Way.

La question clé pour les bouddhistes semble donc être celle-ci : « Cet aperçu de la voie du milieu est-il le plus important des enseignements du Bouddha ? » Si c’est le cas, alors s’accrocher à d’autres aspects des enseignements qui le contredisent est clairement incompatible avec la voie du milieu elle-même. On peut participer à la tradition bouddhiste avec cet ordre de priorité et être également un pratiquant de la voie du milieu. Cependant, si l’on décide clairement que l’autorité traditionnelle est plus importante, sa prétention à être un pratiquant de la voie du milieu a peu de chances de résister à un examen approfondi.

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